Local Gestures
because the personal is cultural
C’est un spectacle. I don’t know why anyone would expect anything else when going to Place des Arts to witness Nederlands Dans Theater passing through Montreal for the first time in over twenty years. For the occasion, we were treated to a Crystal Pite sandwich on Sol León & Paul Lightfoot bread. Sehnsucht opens and ends with a man bowing in a frog-like position at the front of the stage. In the background, a straight couple engages in a pas de deux in a cubic room. Like the needles of a clock, their legs and arms stretch out and rotate around a two-dimensional axis. Their movement is fast-paced while that of the man in the foreground is fluid but sculptural in its slowness and poses, as though time passed more slowly for those alone. The room spins vertically, so that the dancers sometimes appear to defy gravity like Fred Astaire in Royal Wedding, sitting on a chair that hangs from a wall, for example. The choreographers use this magical element to charm the public without pushing it to the point where it would transcend its gimmick. The room disappears and thirteen dancers come out for the middle section. They dance synchronously in a manner that is reminiscent of Ohad Naharin’s Hora: the athletic bodies of the dancer maintain the legs of ballet (pirouettes included); however, while the upper bodies in Hora could be said to fall under a post-modern aesthetic, here they are more akin to music video choreography. (The synchronicity might partially be to blame for this.) The fast pace of the choreography follows along the gaudiness of Beethoven’s Symphony Nr. 5, resulting in the kind of comic effect that the Looney Tunes capitalized on.
Canadian choreographer Pite offers the strongest piece of this triple bill with In the Event. Set against a grey sandy backdrop, eight dancers appear like a group on an expedition through the darkness of a foreign planet. The world around them feels potentially threatening, from their shadows moving along the walls of a cave to the rumbling on the soundtrack and the lightning that shatters the background. However, the dancers are in it together, cooperating as a group, sometimes literally forming a human chain with their limbs. The movement is elastic, round, and refreshingly ungendered. The dancers slide against the floor, sometimes even float above it. A solo provides the piece with a dramatic ending as a man’s hands frantically search the floor and reach for his chest and throat as if he were choking. For Pite, being alone looks like being lost. León & Lightfoot fare better with Stop-Motion, a piece for seven dancers that is gothic-looking with its black background, white and beige pants, white walls, floor and powder, and black and white video projection. The dance is better served by Max Richter’s moody modern classical music. In solos and duos, the agility of the dancers is used to evoke emotion rather than being an end in and of itself like in Sehnsucht. However, the choreographers once again go for synchronicity for the group section; rather than intensifying the effect, it comes across as lazy and dilutes it. As the piece ends, some curtains are lowered while others after are lifted, and the lighting grid also comes down. There is the feeling that León & Lightfoot are doing this just because they can. With this triple bill, they show that they have the dancers and the means to make great art, but they fail to prove that they have the will. November 1-5 at 8pm www.dansedanse.ca 514.842.2112 / 1.866.842.2112 Tickets: 41.50-70$
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Nous étions indéniablement à un spectacle présenté par Danse Danse hier puisque nous nous trouvions à la Place des Arts et que l’odeur de la sueur saturée d’alcool envahissait nos narines. Comme pour la plupart, c’était pour voir The Seasons d’Édouard Lock dansé par la São Paulo Companhia de Dança, puis potentiellement Mamihlapinatapai de Jomar Mesquita et Gnawa de Nacho Duato.
Pas de surprises du côté de Lock. On reconnait sa signature des dernières années, les jambes sportives du ballet mariées à la gesticulation des bras. Les mains paraissent tantôt délicates lorsque le poignet se fracture pour former un angle obtus au bout de bras s’étirant à quarante-cinq degrés, tantôt aériennes alors qu’une femme allonge ses bras et qu’un homme la fait pivoter sur une pointe. De façon similaire, les bras se transforment en ailes lorsqu’une danseuse est soulevée par deux hommes et que ses bras fouettent l’air jusqu’à en devenir des triangles translucides. Les mains se font moins angulaires dans leur interaction avec le visage, le caressant au passage, mais parfois donnant plutôt l’impression de quelqu’un essayant de chasser une mouche. Difficile de ne pas percevoir une certaine vanité dans ces mains constamment attirées par sa propre tête, comme si les danseurs étaient toujours en train de se lécher les cheveux ou de se poudrer. Les jambes arborent des airs militaires lorsqu’elles demeurent collées lors de sauts, conférant aux danseurs l’apparence de casse-noisettes. L’œil est attiré par l’extension du corps sur pointe, par la raideur qui fait glisser l’humain vers l’objet. L’athlétisme des danseuses n’est sûrement jamais plus évident que dans les sections où les hommes manipulent leurs jambes, une main posée sur leur cuisse, avec la même aisance que s’il s’agissait d’un bras. Superbe trouvaille que ces petits bondissement sur pointes avec les genoux légèrement fléchis qui donnent aux femmes des allures de gazelles. La connexion entre les danseurs n’est jamais plus que physique. Chaque interaction n’est que calcul pour composer différentes configurations purement esthétiques. On peut observer les danseurs attendre le moment pour insérer leur mouvement dans celui de leur partenaire. Les costumes noirs des danseurs les effacent partiellement dans la pénombre. L’éclairage tombe du plafond, ne rendant visible que les lignes des bras, des épaules et du visage. On peut aussi voir le torse nu des hommes et les pointes des femmes, blanches. Par moments, la disparition des jambes crée l’illusion de trois torses fantomatiques qui flottent vers nous. Les hommes semblent plus incarnés, entre autres parce que leurs torses sont visibles, mais aussi parce qu’ils sont plus autonomes dans leur mouvement. Avec quelques cinq cents cues d’éclairage pour une pièce qui dure cinquante minutes, les nombreux changements de lumière donnent l’impression que les corps se déplacent dans l’espace sans avoir à se déplacer dans le temps. Avec leurs déplacements incessants – parfois même gratuits – les danseurs semblent souffrir d’un trouble du déficit de l’attention, courant vers les faisceaux des projecteurs seulement pour oublier ce qu’ils devaient faire une fois rendus. Malgré la qualité indéniable de l’œuvre, il m’est difficile de percevoir la valeur de la vitesse dans un monde déjà soûlé à la rapidité. The Seasons était suivi de l’hétérosexuel Mamihlapinatapai (pour lequel les hommes portaient des chandails avec une seule manche, parfaits pour ces journées où on n’arrive pas à déterminer s’il fait chaud ou froid) et du rédempteur Gnawa. São Paulo Companhia de Dança 28-30 avril à 20h www.dansedanse.ca 514.842.2112 / 1.866.842.2112 Billets à partir de 36.75$
MARIE CHOUINARD Il le faut. C’est notre responsabilité de faire vivre nos spectacles plus longtemps. On est obligé. Si on veut vraiment vivre ce bonheur-là de danser nos spectacles plus longtemps, il faut les amener partout dans le monde. Juste jouer dans notre ville natale, ce n’est pas assez. VERSTRICHT Étant donné que vous avez ce privilège, comment vous sentez-vous par rapport à la reprise de Prélude à l’après-midi d’un faune et de Le Sacre du printemps plus de vingt ans plus tard? CHOUINARD On ne les reprend pas; on ne les a jamais lâchés! (rires) Notre Sacre du printemps, ça fait 23 ans qu’on le fait à chaque année. L’après-midi d’un faune aussi. Habituellement, les œuvres que je crée ont la chance de vivre très longtemps. VERSTRICHT Pour vous, c’est une bonne chose, vous n’êtes pas tannée du tout… CHOUINARD Bien non! C’est comme si on disait « La Joconde est-elle tannée de sourire dans son cadre? » (rires) C’est le contraire! Les danseurs aiment danser un grand répertoire de pièces. En ce moment, les danseurs dans ma compagnie sont en Europe et ils font sept chorégraphies différentes pendant la tournée. Ils sont contents. Ils aiment ça. Puis dans une autre tournée, ça va être encore d’autres pièces. C’est le fun. C’est hot de pouvoir danser plein de pièces différentes parce que c’est un répertoire qui a toutes sortes de facettes, d’approches : différentes pièces, différents rôles que les danseurs ont… C’est vraiment excitant pour eux. VERSTRICHT Est-ce qu’il y a une concordance pour vous entre ces pièces qui perdurent et celles que vous voudriez qui perdurent? Est-ce qu’on réussit à prédire celles qui– CHOUINARD Non. C’est bien mystérieux. On ne peut jamais savoir. C’est impossible. À chaque fois que je fais une nouvelle pièce, je me dis, « Peut-être que celle-là ne tournera pas, que personne n’en voudra. Peut-être que moi, je vais l’adorer, mais personne ne va l’aimer. » VERSTRICHT Est-ce qu’il y en a une que vous aimeriez voir revivre? CHOUINARD Oui. J’ai une pièce qui s’appelle LE NOMBRE D’OR… VERSTRICHT J’adore LE NOMBRE D’OR. CHOUINARD Moi aussi, mais elle est compliquée au niveau technique parce qu’il y a un corridor qui s’avance dans le public et je veux du public sur le stage, puis les gens qui l’achètent disent, « Mais là, on ne peut pas vendre nos billets dans la salle… » C’est devenu tellement compliqué pour les producteurs qu’ils ne l’ont presque pas achetée. Au niveau de la scénographie, j’ai fait un design qui n’est pas facile à tourner. C’est plate, hein? (rires) VERSTRICHT Oui, parce que ça mérite vraiment d’être vu. CHOUINARD J’adore cette pièce-là et les danseurs aiment la danser aussi. C’est drôle que vous me parliez de ça parce que je pensais à ça il y a une semaine ou deux, je me disais, « Qu’est-ce qu’on pourrait faire? Est-ce que j’enlèverais le corridor dans le public et le public de sur la scène? » Puis je me suis dit, « Bien non! Ça fait partie de sa beauté toute cette scénographie-là que j’ai faite. » Ça fait que c’est plate. Je ne sais pas ce qu’on va faire. J’espère qu’un jour elle va reprendre la route. VERSTRICHT Étant donné que vos pièces jouent pendant aussi longtemps, est-ce que vous arrivez à dire de façon générale à partir de quel moment une œuvre devient fixe? CHOUINARD C’est pas mal après 2-3 représentations. C’est sûr qu’après le soir de la première, je vais changer des petites choses. Le lendemain de la première ou de la deuxième, je peux couper trois minutes. Je peux faire des gros changements. Les danseurs le savent. Après ça, c’est des détails. C’est sûr que moi, je les trouve importants, mais je ne suis pas sûre que le monde les remarque tant que ça. Ce que j’ai la chance de faire aussi – je mets ça dans mon budget de création – c’est qu’avant de faire ma première mondiale, je m’organise pour faire le spectacle dans un théâtre avec un petit public de rien du tout. Je le fais comme en secret, donc ça me permet de le tester. Par exemple, la première fois que j’ai fait Gymnopédies, c’était en cachette à Miami. Je ne l’ai pas appelé Gymnopédies, je lui ai donné un titre barbare, mais je l’ai testé. (rires) J’ai profité du fait qu’on était là pour dire, « Là, on va faire une pièce un petit peu undercover… » VERSTRICHT Les costumes sont tellement une partie essentielle de vos spectacles, ils colorent tellement la chorégraphie que j’ai l’impression qu’il faudrait qu’ils arrivent assez tôt dans le processus… CHOUINARD Non, ils arrivent à la fin complètement; sauf pour L’après-midi d’un faune parce que je savais dès le début, quand je l’ai créé pour moi, que j’aurais des cornes sur la tête. VERSTRICHT Est-ce que vous vous patentiez quelque chose? Est-ce que vous jouiez avec une sorte de pré-corne? CHOUINARD Oui, je me mettais ça sur la tête, et c’est justement en jouant avec qu’un moment donné j’avais une corne dans mes mains et je me suis rendue compte, « Oh, my God… Si je la mets sur mon pubis, ça fait un phallus. » C’est arrivé de même! Ce n’était pas une idée préconçue. VERSTRICHT Quand on est Marie Chouinard, est-ce qu’il y a encore certains fantasmes de danse qu’on n’a pas réalisés?
CHOUINARD Je n’ai jamais eu de fantasmes. Je ne travaille pas par fantasme. Je travaille par urgence de créer. J’ai des intuitions très fortes de création, puis je crée. Je crée en masse… Je suis en train de créer une pièce pour le ballet de Martha Graham à New York. Je suis aussi en train de peaufiner un duo que j’ai fait pour Les 7 doigts de la main. Je suis tout le temps en train de créer. C’est ça que j’aime faire. VERSTRICHT Si vous êtes dans l’urgence, est-ce que ça veut dire que vous n’avez aucune peur de– CHOUINARD Non, je n’ai pas peur. C’est la joie! (rires) J’ai la création solaire, comme on dit. Je ne suis pas du tout occidentale; je ne vais pas me couper une oreille pour créer. (Je pense à Van Gogh…) Je ne suis pas dans l’angoisse quand je crée. Je suis dans l’action, le bonheur de créer. Je ne dis pas que des fois je ne me retrouve pas peinturée dans un coin à me demander « Qu’est-ce que je fais? Où suis-je rendue? » Mais je sais que, quand tu es dans un coin, il faut que tu recules un peu, puis là tu commences à voir, « Ah… Il y a une porte par là… » VERSTRICHT Quel est votre rapport à la critique? CHOUINARD Je ne les lis pas tellement. VERSTRICHT Pour quelle raison? CHOUINARD Je vais vous dire une réponse que vous allez trouver bizarre… J’ai rarement appris quelque chose. VERSTRICHT Je ne trouve pas ça bizarre du tout. Je trouve ça très intéressant, en fait. CHOUINARD Je préfère avoir une conversation avec un spectateur sur son expérience. Il faut quand même que je dise que des fois des critiques super élogieuses viennent à mes oreilles et ça me fait plaisir. C’est comme quand tes danseurs se font applaudir, quinze rappels… C’est sûr que ça fait plaisir. C’est comme recevoir de l’amour. VERSTRICHT Est-ce votre moment préféré? CHOUINARD Mon moment préféré, c’est de voir mes danseurs sur scène. Je me dis, « Ah… Ils sont tellement bons! » (rires) Je les trouve merveilleux. VERSTRICHT De quoi la danse a-t-elle besoin aujourd’hui? CHOUINARD La danse n’a besoin de rien. C’est nous qui avons besoin de nous grouiller le cul, de créer, de danser. La danse est au-dessus de tout ça. Elle est bien plus grande que nous. Prélude à l’après-midi d’un faune + Le Sacre du printemps 31 mars-2 avril à 20h www.dansedanse.ca 514.842.2112 / 1.866.842.2112 Billets à partir de 36.50$ In 1970, Joann Kealiinohomoku (who just passed away in December) caused somewhat of a stir when she published her seminal essay “An Anthropologist Looks at Ballet as a Form of Ethnic Dance.” Hopefully, that ballet is a form of ethnic dance is now more obvious than it is controversial.
As such, we could say that with her version of Swan Lake, South African choreographer Dada Masilo is making two ethnic dances – ballet and African dance – meet. (There is no such thing as “African dance”, Kealiinohomoku would say, rightfully.) Furthermore, Masilo queers ballet by having Siegfried fall for a male black swan rather than Odette, whom he is set to marry by his parents. As such, her Swan Lake is explicitly about the compulsory heterosexuality that permeates both ballet (countless gay dancers constantly having to act straight, except for that bisexual orgy in Kader Belarbi’s La Bête et la Belle) and life in general. After having a quick run-through of your typical ballet (like Dave St-Pierre running through the whole of La Pornographie des Âmes in the first tableau of the show), a dozen dancers plunge into their own version of Swan Lake; for they do not dance like they did in the summary. Thanks to African dance, the women are more vivacious, shaking their hips and stomping their feet; and, thanks to queering, the men are lighter. When they dance together, their movements are the same, ungendered. Similarly, all dancers sport white tutus. By toying with the conventions of classical dance, Swan Lake plays like a parody of ballet. Despite these subversions, the show otherwise remains quite conventional. All of its politics are in its content and none are in its form. We are inevitably reminded of the poverty of dance as a medium for storytelling. What storytelling and ballet have in common is that they are mere rearrangements of the same elements. Since we already know this story, as we do all stories, we are free to wander off and come back to it without ever having missed anything. As a light nerd, I was also disappointed with Suzette Le Sueur’s permanent blanket lighting provided by twelve equally distant spots at the front of the stage. The ballet ends with a collective suicide (the result of the toxicity of homophobia, I assume), which I presume is meant to be emotional since it is set to Arvo Pärt’s “Spiegel im Spiegel.” There’s no reason to dance to Arvo Pärt. What more could there possibly be to add? What remains is the stellar performance of the dancers of the Dance Factory Johannesburg. January 14-16 at 8pm www.dansedanse.ca 514.842.2112 / 1.866.842.2112 Tickets: 34-63$ 1. Tragédie, Olivier Dubois (Danse Danse)
Avec son opus pour dix-huit danseurs nus, Dubois a abordé les grands thèmes (le passage du temps, la mortalité, la petitesse de la vie humaine, le rôle de l’art, l’humanité) en prenant son temps, en n’empruntant aucun raccourci facile, en laissant le sens émerger de lui-même. 2. Uncanny Valley Stuff, Dana Michel (Usine C) Avec Uncanny Valley Stuff, Michel a continué sa recherche entamée avec Yellow Towel, spectacle qui figure dans le top dix du magazine new-yorkais Time Out et pour lequel le prestigieux festival ImPulsTanz a créé un prix spécialement pour elle. Sa nouvelle courte pièce est toute aussi incisive mais encore plus drôle. En empilant les clichés sur les Noirs jusqu’à ce qu’ils s’entremêlent et se contredisent, Michel démontre l’absurdité de ces stéréotypes qui nous présentent une vision déformée du monde. 3. Antigone Sr.: Twenty Looks or Paris Is Burning at the Judson Church (L), Trajal Harrell (Festival TransAmériques) Antigone Sr. a probablement été le spectacle de danse qui a créé le plus de divisions cette année. On pourrait diviser le public en trois : ceux qui ont quitté la salle, ceux qui sont restés assis les bras croisés, et ceux qui se sont levés pour danser. Il n’est donc pas surprenant que le spectacle se retrouve dans mon palmarès. Il faut dire que je suis queer et que j’ai une affinité pour la danse post-moderne, ce qui me donne une double porte d’entrée sur le sujet. Pour ceux qui n’ont pas eu l’endurance nécessaire pour passer à travers ce défilé de mode DIY de deux heures, il serait bon de noter que les plus grands bals qui ont inspiré la pièce pouvaient durer jusqu’à dix heures de temps; comptez-vous chanceux! Peut-être comprenez-vous maintenant un peu mieux ce que c’est que de se sentir aliéné par la culture dominante. 4. Monsters, Angels and Aliens Are Not a Substitute for Spirituality…, Andrew Tay (OFFTA) Pour être honnête, lorsque j’ai vu la nouvelle pièce de Tay, qui vire de plus en plus dans le performance art, je me suis demandé si j’étais en train de regarder un artiste perdre la tête sur scène ou si Tay était en contrôle de son art. J’étais évidemment assez intrigué pour découvrir la réponse avec Summoning Aesthetics qu’il a ensuite présenté avec François Lalumière au Festival Phénomena. Conclusion : Tay continue dans la même veine ritualiste, sachant clairement dans quelle direction il va même s’il ne connaît pas nécessairement sa destination. J’ai admiré qu’il ait pris la décision de terminer Monsters sur une note différente de ce qu’il avait prévu pendant la représentation même. La misogynie latente qui avait l’habitude d’hanter ses pièces est disparue. Ce qui demeure est son ludisme, son humour et son ouverture aux expériences, peu importe ce qu’elles s’avèrent être. Si je me souviens bien, un spectateur avait qualifié Summoning Aesthetics « d’honnêteté perverse. » Cela me semble aussi approprié. 5. Built to Last, Meg Stuart (Festival TransAmériques) Avec Built to Last, Stuart (qui a reçu le Grand Prix de la Danse de Montréal) a abordé des thèmes similaires à ceux de Tragédie d’Olivier Dubois, mais de façon beaucoup plus théâtrale. En juxtaposant un immense mobile de notre système solaire avec une maquette d’un tyrannosaure et la danse contemporaine avec la musique classique, Stuart a démontré l’insignifiance des actions humaines et que notre seule rédemption possible se trouve dans l’art. 6. Florilège, Margie Gillis (Agora de la danse) Pour célébrer ses quarante ans de carrière, Gillis nous a offert cinq pièces de son répertoire revisitant les années 1978 à 1997. Par le fait même, elle nous a rappelé pourquoi elle est devenue une danseuse de telle renommée. L’intangible se manifeste à travers son corps, soulignant la fragilité de l’humain dans un univers chaotique. 7. Mange-moi, Andréane Leclerc (Tangente) Leclerc a utilisé la contorsion et la nudité pour aborder les relations de pouvoir entre les individus lorsque notre survie dépend des autres. Qu’elle puisse s’attaquer à de telles questions tout en offrant une des pièces les plus sensorielles de l’année démontre l’intelligence de son travail. 8. Tête-à-Tête, Stéphane Gladyszewski (Agora de la danse) Ma réaction à ma sortie de cette pièce de quinze minutes pour un seul spectateur à la fois : on doit donner à Gladyszewski tout l’argent dont il a besoin pour réaliser ses projets. Aucun autre chorégraphe n’arrive à intégrer la technologie avec autant d’adresse. Tête-à-Tête était à la fois intime, inquiétant et magique. 9. The Nutcracker, Maria Kefirova (Tangente) L’excentrique Kefirova a troqué l’écran vidéo pour des haut-parleurs et a démontré qu’elle maîtrise le son avec autant de flair que l’image. « Elle n’utilise pas le son pour meubler le silence comme le fond maints spectacles, mais pour matérialiser l’invisible, » disais-je. Difficile d’oublier la satisfaction ressentie lors de l’exutoire du tableau final, où Kefirova s’acharne à faire éclater des noix de Grenoble en morceaux en se servant de ses chaussures à talons hauts comme casse-noisette. 10. Junkyard/Paradis remix, Catherine Vidal (Usine C) J’espère avoir assez établi le fait que je suis un fan fini de Mélanie Demers pour pouvoir dire ceci (qui, je crois, n’est pas l’opinion populaire) : Junkyard/Paradis est probablement sa pièce que j’aime le moins. Lors de l’événement MAYDAY remix, où la chorégraphe a laissé des artistes remixer son travail, la metteure en scène Catherine Vidal a donné au spectacle la structure dramatique qu’il méritait avec une fin des plus jubilatoires. 11. loveloss, Michael Trent (Agora de la danse) Extrait de ma critique : « Trent n’a toujours pas peur de prendre le temps qu’il faut. De plus, il évite ici l’humour, le théâtral et le mouvement séducteur (athlétique, rapide, synchronisé), toutes ces astuces que des chorégraphes moins confiants utilisent pour que leur dance soit plus accessible. L’interprétation est sentie sans être affectée. loveloss est une œuvre touchante … » 12. Milieu de nulle part, Jean-Sébastien Lourdais (Agora de la danse) Pour la performance de l’année, celle de Sophie Corriveau, qui s’est méritée la toute première résidence de création pour interprètes offerte par l’Agora de la danse. Notons que le diffuseur s’est démarqué avec une programmation solide pour une deuxième année consécutive. When music and movie awards come around, everyone likes to share their own picks and predictions for who should win. Not so with dance awards though. To be fair, dance awards aren’t much of a thing. New York has the Bessies (Louise Lecavalier, Édouard Lock, José Navas, Marie Chouinard and Benoît Lachambre are all local recipients) and Toronto has the Dora Awards (Gilles Maheu & Danielle Tardiff, Paul-André Fortier, Ginette Laurin, Benoît Lachambre, Daniel Léveillé, Tom Casey, Lina Cruz and Marc Boivin have gotten their hands on one), but live productions obviously don’t travel with the same ease that records and movies do, and any prediction that those of us who don’t happen to live in those cities might make would be little more than shooting in the dark.
It’s only three years ago that Montreal got its own dance award, Les Prix de la Danse de Montréal. Its Grand Prix can be awarded to any dance artist having presented work in the city the previous season. In 2012, a prize was added for Quebec choreographers. This year, yet another will be attributed to a Quebec dancer for the first time. Predictions remain difficult as nominations are non-existent. Quebec choreographers need to submit an application to be considered, but there’s no way to know who submitted one. Still, I decided to take a stab at it. Why shouldn’t dance also get some hype? LE PRIX DU RQD - INTERPRÈTE On the radar: Sophie Corriveau (Milieu de nulle part), Michèle Febvre (CHEESE), Margie Gillis (Florilège), Louise Lecavalier (So Blue), Carol Prieur (Henri Michaux : Mouvements), Manuel Roque (Projet In Situ) My pick: Sophie Corriveau (Milieu de nulle part) Corriveau floored me like no other with her performance in Jean-Sébastien Lourdais’s Milieu de nulle part, bringing the choreographer’s embodied aesthetic to its extreme. However, some purists might find that her performance was more acting than dancing. That’s not the only problem. Corriveau is actually part of the jury that gets to pick the recipient of the award this year. (Let’s note that Michèle Febvre is also part of the jury.) Let’s assume that Corriveau is humble enough not to vote for herself; one vote is a big loss when there are only five members in the jury. Her only chance to win is if the other four feel comfortable enough to shove the award in her hands. My prediction: Margie Gillis (Florilège) That’s why my second choice, Margie Gillis, will probably win. She is one of the most recognizable figures in Quebec dance and, with her show that celebrated her forty-year career by revisiting five pieces created over two decades (1978-1997), Gillis reminded us why that is the case. Her practice has legitimized dancing from the inside out. She makes the intangible manifest. LE PRIX DU CALQ POUR LA MEILLEURE ŒUVRE CHORÉGRAPHIQUE On the radar: Marie Chouinard (Henri Michaux : Mouvements), Lina Cruz (Rockin’), Maria Kefirova (The Nutcracker), Benoît Lachambre (Prismes), Jean-Sébastien Lourdais (Milieu de nulle part), Manuel Roque (Projet In Situ) My pick: Marie Chouinard (Henri Michaux : Mouvements) By translating Henri Michaux’s drawings into dance, Chouinard once again proved her ability to think the human body creatively. Some might (wrongly) feel that having a sort of pre-written choreographic score is cheating. Others might (rightly) feel it’s time to give someone else a chance as Chouinard already won the award two years ago… My prediction: Marie Chouinard (Henri Michaux : Mouvements) …but Benoît Lachambre already won the Grand Prix just last year; Maria Kefirova and Jean-Sébastien Lourdais’s work might not be considered “dancey” enough by some; Lina Cruz’s delightfully eccentric work was created for the students at L’École de Danse Contemporaine and so might have slipped under the radar; as might have Manuel Roque’s Projet In Situ (in which his choreography really became his own), which was presented for free in L’Espace culturel Georges-Émile-Lapalme of Place des Arts. For those reasons, Chouinard has a good chance of winning again. LE GRAND PRIX DE LA DANSE DE MONTRÉAL On the radar: Marie Chouinard (Henri Michaux : Mouvements), Olivier Dubois (Tragédie), Jan Fabre (Drugs Kept Me Alive), Margie Gillis (Florilège), Maguy Marin (Salves), Meg Stuart (Built to Last) My pick: Olivier Dubois (Tragédie) After drilling the image of eighteen naked bodies walking up and down the stage into our heads for thirty minutes, Dubois created a work that explored all the big themes (life, the passage of time, mortality, death, and the role of art in all of this; in one word: humanity) without ever resorting to shortcuts, but by letting the meanings emerge on their own. However, the jury will probably consider Dubois too young to win this award (the previous three recipients were all born between 1958 and 1960)… My prediction: Maguy Marin (Salves) …which is why Marin will most likely win. The jury must be wishing that this award existed seven years ago so that they could have given it to her in light of the far superior Umwelt, but this will be their chance, especially since Marin comes to Montreal so rarely. They probably figure that they have a better chance of getting to give the prize to the other five in the future. They might also wish to avoid giving it to Chouinard or Gillis so as to not appear chauvinistic since two of the previous recipients, including last year’s, are from Montreal. Did I miss anyone who should be on the jury’s radar or mine? Prismes de Benoît Lachambre du 2 au 6 décembre (Danse Danse)
Avec l’aide de l’éclairagiste Lucie Bazzo, Lachambre explore à fond les jeux de lumières et de couleurs avec ce spectacle des plus stimulants visuellement. Dans sa tête & Six pieds sur terre de Maïgwenn Desbois du 20 au 21 décembre (Tangente) Avec ses pièces ludiques où elle gigue avec des interprètes ayant le syndrome de Williams et d’Asperger, Desbois nous reflète avec humour notre société capacitiste. Klumzy de Nicolas Cantin du 25 au 27 mars (Usine C) Cantin s’enfonce de plus en plus dans l’antithéâtre avec ce spectacle marquant, une suggestion de biographie de l’interprète Ashlea Watkins où la mise-en-scène de Cantin prend tout autant de place. CEUX DONT LA DERNIÈRE CRÉATION ME DONNENT RAISON D’ESPÉRER Bath House & Cherepaka d’Andréane Leclerc du 21 au 24 octobre (Tangente) Leclerc se sert du corps contorsionniste pour aborder des questions philosophiques et féministes dans des pièces sensorielles. Tête-à-tête de Stéphane Gladyszewski du 8 au 16 novembre (Agora de la danse) Gladyszewski utilise la technologie mieux que quiconque dans le monde de la danse. Pour Tête-à-tête, pièce pour un seul spectateur à la fois, ce dernier doit insérer son visage dans un masque pour voir la performance. Intrigant. Confession publique de Mélanie Demers du 8 au 11 avril (Usine C) Après avoir clos un cycle de pièces de groupe l’an dernier avec MAYDAY remix, Demers plonge dans le vide avec son nouveau spectacle, un solo. Peu de raisons de s’inquiéter; la chorégraphe, drôle et intelligente, ne rate jamais son atterrissage. Wolf songs for Lambs de Frédéric Tavernini du 14 au 18 avril (La Chapelle) Avec son installation chorégraphique Le Tératome, simple et efficace, Tavernini avait créé un univers cliniquement froid et fascinant. Il nous revient avec une autre installation, cette fois explorant l’imaginaire de l’enfance. http://www.dansedanse.ca/ http://tangente.qc.ca/ http://www.usine-c.com/ http://agoradanse.com/ http://lachapelle.org/ Marche, marche dans cette parade infinie de corps vers la mort. Derrière le rideau, des corps obscurcis attendent de se matérialiser pour eux aussi marcher comme ceux qui sont venus avant eux, comme ceux qui viendront après eux, pour ajouter leur maillon dans la chaîne humaine qui progressivement, relativement, deviendra de plus en plus minime, rapetissera jusqu’à n’en devenir qu’un point indéchiffrable, avant qu’ils ne retournent d’où ils viennent, dans un autre monde, dans l’au-delà. Cette marche qui ne peut dévier de la ligne chronologique, cette marche dont l’accumulation incessante du temps efface la signifiance de toute action humaine. Cette marche au rythme du battement incessant du tambour, du temps qui n’arrête pour personne. Cette marche qui ne se résume que par elle-même. La Tragédie d’Olivier Dubois, c’est peut-être ce défilé de dix-huit corps nus, microcosme humain, vers l’inévitable mort. Ou c’est peut-être autre chose… Pour un instant, la marche se ralentie, comme si on la plaçait sous une loupe. Ce moment n’est pas plus signifiant que n’importe quel autre. Il est tout comme celui qui vient avant ou après. La poète Edith Sitwell a dit que la poésie est la déification de la réalité. N’importe quel moment pourrait être ralenti, être déifié, être poésie. Les acteurs de ce choeur épousent des poses statuesques. Par le fait même, ils dessinent leur vie, la colorent, l’écrivent. La tragédie est peut-être plutôt la mythologie que l’humain crée pour être moins animal, pour être plus divin : pour que sa vie excède sa propre durée. Le Christ est mort; longue vie au Christ! Des mouvements individuels commencent à émaner des corps, les propulsent hors de leur rang. L’espace doit maintenant être navigué pour éviter les collisions avec les autres. On ne peut parler de liberté. Les mouvements ne semblent pas consciemment choisis autant qu’ils semblent naturellement se manifester par ce qui fait de chacun un individu au-delà de son contrôle. On ne crée pas le destin; on le réalise. Au coeur de ces convulsions, des mouvements synchronisés apparaissent, la collectivité donnant par moments à l’individu quelque chose d’un peu plus grand que lui. La déification par le nombre, par l’amplification, par la volonté : le désir même de la déification. Une lumière stroboscopique fragmente l’action en images partielles. Nous ne percevons que des fragments du tout. Comme toujours, chaînon que nous sommes. 1-3 mai à 20h Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts www.dansedanse.ca 514.842.2112 / 1.866.842.2112 Billets : 34$ + taxes Je suis critique de danse parce qu’il y a huit ans j’ai eu la chance de voir Carol Prieur incarner les dessins d’Henri Michaux. Aujourd’hui, ce sont les douze danseurs de la Compagnie Marie Chouinard qui se prêtent à l’exercice. Malgré les centaines de spectacles de danse que j’ai vus entre ces deux moments, l’effet demeure saisissant. Tentative d’explication. Henri Michaux : Mouvements Chouinard et ses danseurs font une lecture littérale des dessins à l’encre de Chine des Mouvements de Michaux. Non. Impossible. Ils font une traduction littérale de ses dessins. Mot à mot. Dessin à danse. D’un médium à un autre. Tout ne peut être qu’interprétation. Ce travail de traduction infuse la chorégraphie de positions, de mouvements inhabituels. Rien n’est, ne peut être littéral. Pour suivre ces instructions au pied de la lettre, il faut faire preuve d’imagination. C’est ça, la danse. À partir de contraintes, trouver des solutions créatives à travers le corps. Le corps est souvent perçu comme étant la prison de l’âme. La danse le nie. Elle lui donne sa liberté. Sans lui, rien. La prison, c’est le non-être; le non-corps. Mais, oui, lecture il y a. Lecture dans le corps. La course effrénée, de gauche à droite, de haut en bas, pour suivre l’ordre des dessins sur la page. Le temps de tourner la page : la brève attente, l’anticipation. What next? Le désir de lire. Gymnopédies Chouinard sort les Gymnopédies d’Erik Satie des annonces de salon funéraire et les emmène dans le Jardin d’Éden. Début de cocons; naissance des danseurs, nus. Des pointes, des jambes écartées, des genoux formants des angles de 90 degrés, un pont humain, une image rappelant bODY-rEMIX/les vARIATIONS gOLDBERG, autre œuvre de la chorégraphe. Parade de séduction avec une certaine dose d’autodérision. Merci, nez de clown! Danse animale, rituel d’accouplement, ébats amoureux, d’abord très hétéro, très sexuel, comme c’est souvent le cas chez Chouinard. La lumière comme fruit défendu : les danseurs sont vus, comme ils l’étaient déjà; ce qui change, c’est qu’ils voient qu’ils sont vus. La perte de l’innocence. Ils se cachent sous leurs couvertures. Retour au cocon. Renaissance qui demande qu’on renouvelle notre regard, qu’on se défasse de nos attitudes face à la nudité, au sexe, de notre fausse pudeur catholique. Rideau. Non. Fausse fin. Série de fausses fins. C’est drôle. Je me disais que les danseurs, qui ont dû apprendre à jouer les Gymnopédies au piano, doivent être écœurés de les entendre. C’est la version mélancolique de la chanson qui ne finit plus. Ce semble à propos que le spectacle ne finisse plus non plus. 31 octobre-2 novembre à 20h Théâtre Maisonneuve www.dansedanse.ca 514.842.2112 / 1.866.842.2112 Billets à partir de 34$ « Malgré les apparences, tout est relié, » la chorégraphe Maguy Marin semble vouloir dire avec ce fil à peine visible que les sept interprètes de Salves s’acharnent à dérouler en début de pièce. C’est un monde fragmenté qu’elle nous présente en une série de courts tableaux se balançant entre l’impressionnisme et l’expressionisme. En 2011, le jeune chorégraphe montréalais Patrick Lloyd Brennan avait présenté The New Bourjoiesie, une œuvre théâtrale qui se voulait un portrait satirique d’une génération éduquée mais incapable d’accomplir quoi que ce soit. Avec Salves (créé en 2010), Marin offre un univers similaire, sans toutefois cibler une génération en particulier. C’est plutôt le vingtième siècle au grand complet qui y passe. Une pièce aux murs noirs nous plonge dans un huis clos. À peine éclairé, cet espace semble hanté par ses propres souvenirs qui déferlent en une série d’images. La bande sonore accentue l’effet, utilisant des bandes magnétiques qui nous ancrent dans le passé avec la statique et les voix qui s’entremêlent. Dans la mémoire, la chronologie n’existe plus et tous les moments peuvent se côtoyer. Le fil invisible retourne en boule. On pourrait aussi penser à L’Ange exterminateur de Luis Buñuel, bien que Marin ne s’attaque pas aussi précisément à une classe sociale. Avec Buñuel, c’était la bourgeoisie qui écopait. Ici, c’est tous ceux qui tentent désespérément d’ignorer la misère du monde pour pouvoir s’enfermer dans leur confort. Marin fait appelle à plusieurs icônes, incluant celle-ci : See nothing. Hear nothing. Say nothing. Mais, comme tout est relié, on ne peut y échapper. La réalité nous rattrape sans cesse. Même dans la tentative de confort, la faille s’incruste. Tout semble compliqué sans bonne raison. On dépense de l’énergie dans un travail à la chaîne alors qu’une seule personne y serait sûrement plus efficace. Tout est fait à la course. Inévitablement, une assiette glisse des mains et éclatent en morceaux. Les tableaux ne veulent pas demeurer suspendus au mur, comme si un malin fantôme s’amusait à défaire tout ce que les habitants de cette demeure tentaient d’accomplir. Rien ne semble fonctionner. Tous les efforts sont frustrés. Le travail n’offre pas de résultats. On est dans l’insatisfaction. Le monde extérieur s’impose lorsque, dans cet univers cohésif, un homme en blackface émerge et doit bousculer les habitants pour se faire une place sur un long banc. C’est à ce moment que Salves prend son ampleur politique. Refuser de sacrifier son propre confort pour faire une place à l’autre. Plus tard, c’est un soldat qui débarque et qui vient chambouler la maisonnée. La guerre est toujours heureusement ailleurs jusqu’à temps qu’elle ne le soit plus. Dans une scène mémorable de The New Bourjoiesie, deux personnages tentaient de préparer leur appartement pour un party en chamboulant tous les objets qui se trouvaient sur une table. Dans Salves, on prépare maintes fois des tables pour des banquets qui n’arrivent jamais. Encore une fois, on pourrait penser à Buñuel et son film Le Charme discret de la bourgeoisie. À partir de ces fragments, la maison semble vouloir composer une mémoire collective, tout comme ses habitants qui veulent rapiécer les pots cassés, sans jamais vraiment y parvenir. Comme on s’y attend de la part de Marin, Salves est une œuvre exigeante, mais dont l’univers est si bien défini qu’il finit par s’imposer. 26-28 septembre à 20h Théâtre Maisonneuve www.dansedanse.net 514.842.2112 Billets à partir de 29.50$ |
Sylvain Verstricht
has an MA in Film Studies and works in contemporary dance. His fiction has appeared in Headlight Anthology, Cactus Heart, and Birkensnake. s.verstricht [at] gmail [dot] com Categories
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